Reflets de la journée du 9 mars

Suite à la tempête du 24 juillet, notre association, le Club 44, le Réseau Mycélium, MUZOO et la Ville de La Chaux-de-Fonds ont proposé une une journée pratique, réflexive et artistique pour pe(a)nser les arbres en ville. Mettre en mots, saisir les maux, pour prendre soin de la ville, de ce qui la vivifie et de notre avenir.

Ce fut une journée mémorable, avec la douceur du beau temps et des belles personnes, dans différents lieux : les Jardins du Mycélium, le parc des Crêtets et le Club 44. Voici les reflets détaillés de ces douze heures.

Jardins du Mycélium, 9 h 45- 11 h 30

Dans ce grand jardin en pleine ville de La Chaux-de-Fonds, un atelier a été organisé autour des enjeux liés à la plantation d’un arbre. Simon Renaud a accueilli les trente personnes présentes en insistant sur le credo de son groupe : apprendre de la nature et des autres et apprendre aux autres. Le cours est ici à télécharger.

Michel Colin a parlé ensuite du rôle des champignons pour le développement d’un arbre.

Deux groupes se sont alors créés. Le premier est allé dans la maisonnette écouter la spécialiste des sols Silke Roth, membre de l’association des Jardins du Mycélium et formée en création de compost bio et dans l’analyse de la vie du sol.

Le second a assisté sous la conduite de Simon Renaud à la plantation d’un cormier (puis d’un néflier d’Allemagne) : sortir l’arbre de sa protection, le décompacter pour déployer ses racines, le planter dans un terreau préparé dans un trou, l’entourer de compost, l’arroser, le maintenir avec un grand tuteur-pieux.

Les groupes ont ensuite alterné sous le regard des caméras de Canal Alpha et de Muriel Antille, photographe de ArcInfo.

Parc des Crêtets : 12 h 15 -13 h 45

Ce parc est un endroit symbolique de la dévastation. Environ 90% de ses arbres ont été ravagés. Autour de son beau kiosque à musique préservé, nous avons engagé deux artistes de la région pour faire souche, panser l’absence.

La compagnie de danse Kane de Maky Grochain a présenté Senforester, une performance immersive puissante qui raconte l’histoire fascinante d’une graine qui se transforme en un arbre grandiose. Chaque mouvement exprime la croissance et la force de la nature. Ici, la vidéo de 8 minutes gracieusement filmée pour nous par Robin Erard.

La chanteuse Giulia Dabalà  a ensuite présenté un concert en interprétant ses compositions seule au piano, combinant beat box et boucles enregistrées en live à l’aide d’un looper.

Club 44 : 13 h 00 – 21 h 00

Conférence, tables rondes, expositions, jazz : le Club 44 a été le lieu de l’après-midi et de la soirée.

EXPOSITIONS

Les photographies de Muriel Antille, prises le 24 juillet de 12 h13 à 17 h 10 étaient encore visibles depuis le vernissage du 13 février. Ici le lien vers le reportage de la RTS sur cette exposition. Les photos ci-dessous sont des captures d’écran du sujet de la RTS.

Deux autres artistes, l’une de La Chaux-de-Fonds, l’autre de Vevey, Aline Jaquet Tissot et Marinella Lo Vecchio, ont exposé des dessins et peintures sur le thème des arbres, DES ARBRES POUR VIVRE. Leurs oeuvres ont été vendues au bénéfice de notre association et ont rapporté près de 2200 francs.

Catherine Louis a exposé des originaux d’arbres et des reproductions de travaux réalisés avec les enfants des écoles. Suite à la tempête du 24 juillet, elle a eu besoin de faire naître des arbres avec son pinceau et ses pigments : une manière de leur rendre hommage et de faire passer un peu sa tristesse face à ces paysages désolants. Elle a alors décidé de rencontrer des élèves pour partager sa technique en amenant pinceaux chinois, pigments et papiers en classe. La direction de l’Ecole obligatoire de La Chaux-de-Fonds l’a soutenue. 10 classes auront dessiné près de 1500 arbres.

TABLES RONDES

14 h 15 – 15 h 30

Tables thématiques animées par le Réseau Mycélium

Autour de tables thématiques, le Réseau Mycélium a été le facilitateur de discussions ouvertes à toutes et tous, afin de contribuer à façonner un avenir verdoyant et résilient pour notre ville. Une cinquantaine de personnes ont ainsi « tourné » autour de quatre tables et de leur quatre thèmes : comment penser le processus de renouvellement des arbres après la tempête du 24 juillet; comment se sentir inclus·e et inclure d’autres dans le processus de renouvellement des arbres; comment les arbres seront intégrés en ville dans cinquante ans; de quoi aurait-on besoin pour se connecter aux arbres, quelles émotions déclenchent-ils ?

Les quatre animatrices et animateurs ont ensuite eu une demi-heure pour faire la synthèse de leur groupe, qui a été présentée au début de la seconde table ronde.

16 h 15 – 17 h 30

Table ronde avec des spécialistes des arbres en ville et de la biodiversité

Pauline Seiterle, l’animatrice de l’émission de la Première, Côté jardin, a été la modératrice d’une table ronde autour de la question des arbres en ville.

Y ont participé de gauche à droite sur l’image : Antoine Sauser (chef de projet au service de l’environnement de la Ville d’Yverdon), Michaël Rosselet (responsable du patrimoine arboré à la Ville de Lausanne),Gilbert Dey (co-initiateur du projet Espace Abeilles à Evologia, Cernier), Silke Roth (membre du Réseau Mycélium, spécialiste des sols) Roger Hofstetter (paysagiste et concepteur des Jardins extraordinaires à Evologia). Ces belles personnes travaillent sur le terrain et nous ont aidés à penser la nécessaire transformation de notre ville.

Antoine Sauser considère l’arbre à l’égal du patrimoine : à s’approprier, à s’y attacher et à entretenir. Il vit chaque jour des divergences de vues entre ses services et les ingénieurs de sa ville, divergences qui s’estompent quand on travaille en transversalité en créant des projets pilotes. Il y a même parfois des législations qui se contredisent.

Mikaël Rosselet constate aussi qu’il faut essayer de dépasser ces divergences. Certaines normes ont été faites pour un autre temps. Son métier a été bouleversé par la question de savoir quels arbres vont résister dans cinquante ans. Il faut donc au maximum diversifier les forêts, très résilientes, ce qui favorisera une belle biodiversité. Il est nécessaire de tuer le mythe de l’élagage et du taillage pour soigner les arbres. Seules les tailles nécessaires pour protéger les lignes de bus sont indispensables. « Un bel arbre est un arbre dont on ne voit pas qu’il a été taillé. »

Gilbert Dey surenchérit en parlant de « tailles concierge » et parfois d’absence de logique quand on taille des saules avant que leurs chatons pollinisateurs se développent. Il raconte l’histoire de cette citoyenne du Seeland, initiatrice d’un couloir à papillons, soutenu par le Papillorama de Chiètres et le canton de Berne.

Roger Hofstetter a parlé du projet d’Evologia 2024, axé dès fin juin 2024 autour des arbres et de leur puissance poétique. Il souligne le manque de moyens pour organiser des activités pédagogiques alors qu’il existe une forte demande.

Silke Roth pense que notre ville a les moyens d’améliorer ses sols. Il faut apprendre dans les écoles ce qui vit dans le sol, aussi tout ce qu’on jette en ville. Ne faudrait-il même pas utiliser mieux nos excréments comme dans d’autres lieux du monde ?

18 h 15 :

CONFÉRENCE DE CAROLINE MOLLIE, « PLANTER LA VILLE POUR DEMAIN »

Avant cette conférence nuancée et remplie de poésie, la déléguée culturelle du Club 44, Marie-Léa Zwahlen, a donné la parole à Patrick Herrmann, conseiller communal responsable des espaces verts (voici son discours), Yves Tissot, président de notre association et Edgar Ramel, nouvel architecte-paysagiste de notre ville.

Architecte-paysagiste et membre d’honneur de la Fédération française du paysage, Caroline Mollie a été en charge, au ministère français de l’Environnement, d’un programme de protection et de réhabilitation de l’arbre d’ornement. Elle est une personnalité de référence dans le domaine du paysage et de l’arbre dans la ville. Remplie d’humour léger, elle a donné une conférence lumineuse, illustrée de nombreuses images urbaines, Planter la ville pour demain, sous-titrée À l’ombre des arbres, les arbres de compagnie.

La conférence a commencé par le rappel historique que les arbres et la ville ont une vieille histoire commune :  au moyen-âge, l’arbre était au centre de la place, un lieu de fête et de plaisir dont la tradition perdure. Depuis le XVIe siècle, avec les mails (jeux de promenade), les cours, allées, esplanades et avenues, ces structures végétales ont traversé le temps et dispensent encore aujourd’hui l’ombre salutaire au centre de la cité. 

Alors que veut–on ? Continuer qu’ils nous émerveillent, nous donnent de l’ombre, hébergent les oiseaux et respectent le vivant ? Ou faire n’importe quoi ?

Caroline Mollie a ensuite énuméré, avec des exemples de villes françaises, les nombreuses fausses bonnes idées qui ont cours :

  • – L’élagage qui fait mourir l’arbre à petit feu, qui le rend dangereux ou lieu de le sécuriser
  • – Les arbres en pots, un décor illusoire, coûteux et éphémère
  • – Les transplantations de gros sujets, des traumatismes dont les arbres ne se remettent pas
  • – Les forêts urbaines, qui ne sont plus de lieux de vie
  • – Des plantations en surnombre auxquelles il faut préférer des bons arbres aux bons endroits.

Quelques règles sont à respecter :

  • – Laisser les arbres vivre en ayant confiance en leur capacité à être bien portant (par exemple en les gardant quand on veut construire de nouveaux bâtiment autour)
  • – Valoriser l’existant pour de belles canopées : au Pod, éviter de les planter trop serré comme à l’époque, afin que, comme aujourd’hui, ils puissent se développer. Sur ce pont le compte-rendu d’ArcInfo n’a pas compris la référence à notre ville qu’a fait la conférencière qui a valorisé le travail en cours depuis plusieurs années.
  • – Renouveler le patrimoine arboricole, comme à Lyon, en plantant les arbres jeunes et à bonne distance
  • – Bien choisir les essences, exotiques ou naturelles, en fonction de leur adaptabilité future aux changements climatiques
  • – Planter les bons arbres aux bons endroits : avec de l’air, de l’espace (pas comme sur le Pod du début du XXe siècle !), de la terre qui puisse laisser les racines se développer (bien travailler en transversalité avec les services techniques des villes), des sols perméables autant que possible
  • – Désimperméabiliser les sols
  • – Planter, planter, planter autant que possible dans les zones commerciales, les entrées de villes, les parkings de supermarché, les quartiers sensibles, les rond-points

Avec l’accord de Caroline Mollie est ici présentée la presque totalité de ses diapositives (en petit film de 4 minutes ou en série d’images) qui ne sont aucunement une charge contre la ville de La Chaux-de-Fonds, contrairement à ce qu’a hélas laissé entendre l’article d’ArcInfo consacré à cette conférence.

La soirée s’est terminée par un apéritif et un concert de jazz du Bovet Quartet de Lucien Bovet, de son frère et de deux amis.

Cette journée a été organisée avec le Club 44, les Jardins du Mycélium, MUZOO et la Ville de La Chaux-de-Fonds. Selon l’article 10 des statuts de notre association DES ARBRES POUR RÊVER DEMAIN, les frais des activités culturelles qu’elle organise en lien avec les arbres peuvent être financés par les revenus de sa fortune. Ainsi, elle fait partie des associations et institutions qui sont à l’initiative de la journée du 9 mars 2024. 

L’intégralité des cachets des trois manifestations artistiques (danse, chant et jazz) a été financée par des mécènes privés que nous avons sollicités pour l’occasion et que nous tenons à remercier chaleureusement.

Les photographies sont de Daniel Musy, Marie-Léa Zwahlen, Célestin Jobin et Catherine Louis

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